L’Angleterre a souvent une longueur d’avance en matière de performance environnementale et elle bat tous les records avec ses 700 000 résidences écologiques construites sur son territoire. Un nouveau pas a été franchi avec l’adoption du Code for Sustainable Homes (CSH) en 2008. Celui-ci intègre des pratiques durables au code de la construction résidentielle. En quoi consiste-t-il et comment s’en inspirer au Québec?

Un certificat écologique obligatoire pour toute transaction immobilière

Vous souhaitez acheter une maison neuve. Au Québec, votre coup de coeur aura un bilan énergétique et écologique inconnu, à moins d’être construit selon un programme volontaire de certification écologique des maisons. En Angleterre, c’est une toute autre histoire. Le promoteur ou vendeur sera dans l’obligation de vous remettre un certificat décrivant la performance écologique de la maison : la gestion de l’eau, la consommation énergétique et la provenance des matériaux sont, entre autres, scrutés à la loupe. La note globale est exprimée sur une échelle de 1 à 6. Si le vendeur a oublié ou négligé de faire évaluer la maison, il devra télécharger un certificat… comportant la note peu reluisante de “nul”. De quoi éloigner des acheteurs potentiels!

Des habitations carboneutres en 2016

Alors que le Québec se donne jusque 2012 pour réduire de 10 Mt ses émissions de gaz à effet de serre et peine à resserrer ses exigences en matière d’efficacité énergétique pour maisons neuves, les Anglais passent à la vitesse supérieure. Le CSH exige un calcul de la quantité de CO2 émise par toute maison neuve. Dès 2010, des seuils d’émissions maximales seront implantés et en 2016, toute maison neuve devra présenter un bilan carboneutre. Trop exigeant? Pour chercher un point additionnel, le constructeur devra également rendre compte des émissions d’oxydes d’azotes (NOx), puissant gaz à effet de serre (GES).

Encouragement des bonnes pratiques écologiques

Au delà des exigences en matière d’émissions de GES, le CSH vise à créer des conditions favorables à l’adoption d’habitudes de vie saines et écologiques. Il récompense des maisons ayant des espaces pour sécher le linge à l’air libre, pour entreposer adéquatement les vélos et utiliser un bac à compostage. D’autres critères innovateurs prônés par la norme : une configuration intérieure permettant un éventuel bureau à la maison, ou une conception extérieure contribuant au sentiment de sécurité générale du voisinage. Autant de bonnes pratiques qui ont un impact non négligeable sur l’environnement mais ne font pas augmenter les coûts de construction.

Propositions pour un code de l’habitation durable au Québec

La force du système britannique réside dans le système d’étiquetage uniformisé des maisons. Un tel système, fiable et vérifié par une tierce-partie, permet aux acheteurs de comparer l’efficacité énergétique, les impacts sur l’environnement et les impacts sur la santé des maisons. La mise en place d’un tel code au Québec ferait avancer d’un grand pas les pratiques de construction résidentielle.

« L’Angleterre a longtemps été un modèle pour ses réussites en construction durable, » note Alec Derghazarian, candidat à la maîtrise en Environnement à l’Université de Sherbrooke, dont le mémoire porte sur les normes internationales en construction durable. «C’est évident que le Québec traîne loin derrière l’Angleterre, mais il fait piètre figure même au Canada. La norme d’efficacité énergétique que le Québec envisage adopter en 2012 sera déjà désuète dans trois autres provinces dès son apparition.

Concrètement, un CSH à la québécoise demanderait des ressources humaines supplémentaires pour systématiser les inspections écologiques des maisons. Un objectif atteignable, juge Emmanuel Cosgrove, directeur d’ÉCOhabitation, puisque douze évaluateurs professionnels sont déjà formés pour inspecter les habitations en cours de certification LEED au Québec. « Chacun peut potentiellement inspecter 500 maisons par année alors qu’il y avait environ 48000 nouvelles mises en chantier d’habitations au Québec en 2007-2008 »

Les barrières à l’adoption d’un code national seraient d’un autre ordre. « Il faut changer les mentalités au Québec» poursuit M. Cosgrove, « un bâtiment vert n’est pas un bâtiment cher ». Le directeur estime qu’il faut mettre l’accent sur la panoplie d’actions et de bonnes pratiques qui n’entraînent pas de surcoût initial et qui permettent d’épargner à terme, par exemple la construction de maisons de taille modeste et orientées en fonction du soleil.

Écohabitation sensibilise la population québécoise à la construction durable des maisons depuis une dizaine d’années et la situation a bien évolué depuis les premiers pas de l’organisation: les quotidiens québécois traitent désormais régulièrement des thématiques liées à la construction verte et des centaines d’unités d’habitation sont en cours de certification LEED® au Québec. La Ville de Montréal vient même d’annoncer que dorénavant, tous ses nouveaux édifices commerciaux devront être certifiés LEED® Or. Malgré tout cet engouement, il faudra mettre les bouchées doubles pour rattraper nos confrères britanniques.

En adoptant un code de l’habitation durable, le Québec se placerait à l’avant-garde de la construction résidentielle durable au Canada. Ce serait aussi l’occasion de remettre nos pendules à la même heure que le Big Ben qui continue à nous distancer de plus belle avec l’annonce cette semaine de la création de quatre éco-villes britanniques d’ici cinq ans…

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