Suite au premier volet de notre dossier sur les retardateurs de flammes, Écohabitation a mené une petite enquête sur le terrain pour connaître les difficultés auxquelles sont confrontés les consommateurs à la recherche de meubles sains sans composés retardateurs de flammes. En boutique, en personne, sur le web, au téléphone… Nous avons arpenté les grandes artères de Montréal et visité différents types de magasins et d’ateliers.

Des composés méconnus du public… Et des vendeurs !

Les retardateurs de flammes sont des composés chimiques utilisés pour ignifuger les ameublements de nos maisons afin d’en réduire la combustion. Bien que critiqués pour leur inefficacité et leur nocivité pour la santé et l’environnement, ces composés sont toujours utilisés par les manufacturiers dans le but de répondre à une norme d’inflammabilité imposée par la Californie en 1975.

Bonne nouvelle cependant; le 30 septembre dernier, la Californie a marqué une grande victoire pour la santé et l’environnement lorsque le gouverneur Jerry Brown a signé le projet de loi exigeant l’étiquetage des produits chimiques toxiques dans les meubles rembourrés. Le gouverneur Brown a également exigé que la Californie modifie sa norme d’inflammabilité, qui spécifie maintenant que les exigences en matière de sécurité incendie peuvent être atteintes sans l’ajout de produits chimiques ignifuges. Il est permis de croire  que ce changement de réglementation aura des répercussions positives même chez nous, puisque les fabricants pourraient adopter transversalement les mesures destinées au gigantesque marché californien.

Utilisés sur les meubles et textiles depuis plusieurs dizaines d’années, les retardateurs de flammes restent pourtant mal connus des consommateurs et même… des vendeurs. Rechercher des meubles sains peut se transformer en une véritable chasse au trésor. Il faut prendre le temps de poser la question; souvent à plus d’une personne, voire d’un département.

Pour cette enquête, nous nous sommes rendus dans divers magasins d’ameublement de Montréal. Premier constat : les vendeurs sont rarement au courant de ce que sont les retardateurs de flammes. Dans plusieurs cas, les responsables des magasins, mieux informés, sont souvent intervenus pour nous renseigner sur le sujet.

Autre constat : les services à la clientèle (contactés par téléphone) de plusieurs compagnies d’ameublement ne sont pas non plus d’une grande fiabilité. D’autant plus surprenant : en appelant la compagnie, puis le magasin, nous nous sommes parfois retrouvés à quelques reprises avec des réponses totalement contradictoires.

Les grandes chaînes d’ameublement : difficile de trouver sain à bon prix

Mauvaise nouvelle : il est difficile, voire impossible (pour le moment du moins!), de trouver des meubles sans retardateurs de flamme dans les magasins offrant des prix très concurrentiels. Et pour cause, leurs produits sont souvent importés et répondent donc au standard californien. Il en est de même pour les compagnies canadiennes qui exportent leur marchandise à l’étranger.

À titre d’exemple, nous avons visité le fabricant de meubles canadien EQ3. Il conçoit toutes ses pièces rembourrées à Winnipeg (Manitoba) et pourtant, tous ses produits contiennent des retardateurs de flammes. En effet, même si la production de composés à base de PBDE (produits bromés) est interdite au Canada depuis 2008, aucune loi n’empêche les fabricants d’utiliser d’autres types de retardateurs de flamme, comme le TDCPP (à base de chlore) afin de rentrer dans les critères d’exportation.

Faut-il se ruiner pour acheter un sofa sain ?

Se ruiner, peut-être pas. Investir plus que prévu… Oui. Attention cependant : dépenser pour une sofa luxueux ne vous aidera pas nécessairement à consommer mieux. C’est ce que l'on constate dans les magasins visités offrant des meubles haut de gamme importés d’Europe, où seuls les sofas à plus de 8 000 $ sont dépourvus de produits ignifuges.

sofa Max - Van Gogh Designs (chez Ludovik)
sofa deux places Van Gogh Designs, disponible chez Ludovik © Van Gogh Designs

Après d’innombrables recherches infructueuses, nous avons enfin trouvé un magasin de meubles et de décorations qui commercialise des sofas sains : la boutique Ludovik, située sur la rue Notre-Dame Ouest, à Montréal. Avant de nous répondre, le responsable a pris le temps de contacter ses fournisseurs et il s’avère que l’une des marques qu’il commercialise, Van Gogh Designs, fabrique des sofas sans retardateurs de flammes. Il s’agit d’une marque canadienne établie à Vancouver, certifiée ISO 9001 (systèmes de gestion de la qualité). Le prix de leurs sofas varie entre 1500$ et 3500$, en fonction du modèle, du tissu et du rembourrage choisi (sofas de 3 à 5 places). Il s’agit du meilleur prix que nous avons trouvé pour un sofa sans retardateur de flammes.

Attention cependant ! Même en faisant appel à des fournisseurs et distributeurs sympathiques et attentionnés, il nous a été impossible de voir la preuve de l’absence des retardateurs de flamme. Aucune fiche technique ni analyse de produit n’a été réalisée par Écohabitation. Ici, nous avons donc choisi de faire confiance, et souhaitons en toute transparence vous en aviser. 

Privilégiez l’achat local

Si vous comptez  investir dans un sofa sain et de bonne qualité, tout en ayant l’embarras du choix entre les modèles proposés, le mieux est encore d’acheter local.

sofa Cara sans retardateur de flamme
sofa Cara deux places © Interversion

Interversion offre depuis 25 ans du mobilier conçu et fabriqué exclusivement au Québec. La marque propose un service sur mesure, donc si vous voulez un sofa sans retardateurs de flammes, il vous suffira de le demander. Le prix des sofas démarre à 2400 $ (2 places, revêtement en cotton), fabriqué en bois sans COV (composés organiques volatils).

 

sofa Stanley composable
sofa Stanley composable © Montauk

Un autre magasin a retenu notre attention : Montauk Sofa. Cette boutique propose des sofas esthétiques, confortables et dépourvus de tout produit retardateur de flammes. Les meubles sont fabriqués à Montréal, pour un service totalement sur mesure. Évidemment, la qualité a un prix. Comptez au minimum 3800 $ pour un sofa 3 places (revêtement tissu, base en érable). Ce sera ensuite à vous de personnaliser votre sofa en fonction de vos goûts et de votre budget.

L’Atelier Hoch n’offre pas de sofas et canapés, mais de jolis meubles contemporains en bois récupéré ou certifié FSC. Leurs fauteuils une place, en panneaux de bois NU Green et rembourrage à base de plantes, sont intéressants. 

Rénover ses meubles : une autre excellente solution

Si vous disposez déjà d’un sofa que vous avez acheté ou récupéré, pourquoi ne pas opter pour sa rénovation ? Luwiss Éco-rembourrage et Foutu Tissu, dont nous avons déjà parlé dans notre article Nos alternatives écolos à IKEA (3) : Meubles usagés et rénovation saine, sont des professionnels dans le domaine, deux ateliers exemplaires de Montréal, qui utilisent des matériaux écologiques pour remplacer les composantes de vos meubles. Chez Luwiss Éco-rembourrage, on explique que d’ordre général, les prix sont « 50 à 60% inférieur à l’équivalent neuf et haut de gamme, 25% supérieur à l’équivalent neuf et bas de gamme ». Chez Foutu Tissu, une restauration de sofa débute à 600$ et les prix varient ensuite selon le type de projet.  N’hésitez pas à les contacter pour une soumission ou pour plus d’information au sujet de leurs services.

La liseuse - Foutu tissu
© Foutu tissu

Pour consommateurs avertis

Notre constat après avoir passé plusieurs jours à enquêter auprès d’une quinzaine de magasins de Montréal : il est souvent plutôt ardu de trouver les informations exactes sur les composantes chimiques des meubles. La mission s’avère d’autant plus compliquée qu’on trouve très peu de renseignements à ce sujet sur les sites Internet des divers manufacturiers et distributeurs, et que dans les salles de montres et boutiques, les meubles sont exposés sans la moindre étiquette ou fiche informative. Ce sera donc à vous de faire vos recherches, poser des questions et juger de la crédibilité des vendeurs en fonction des arguments qu’ils avancent. D’où l’importance d’être soi-même bien informé sur les retardateurs de flammes !

Aussi, n’oubliez pas que certaines boutiques commercialisent plusieurs marques, dont certaines utilisent des retardateurs de flammes et d’autres pas. N’hésitez pas à vous renseigner auprès du responsable du magasin. S’il n’est pas au courant, il pourra toujours appeler ses fournisseurs.

Notre petit guide d’achats ne se prétend pas exhaustif, mais plutôt représentatif de l’exercice de magasiner un sofa sans retardateurs de flamme à Montréal. Vous connaissez une marque de sofas sans retardateurs de flammes qui nous aurait échappé, à Montréal ou ailleurs ? Faites-nous le savoir via la section commentaires ci-dessous; nous ferons nos recherches et pourrons mettre à jour notre petit guide d’achats. 

Guide d’achats

  • Atelier Hoch : 5550 rue Fullum, suite 218, Montréal / 514-253-5732 / www.atelierhoch.ca
  • Foutu Tissu : 2177 rue Masson (suite 306) Montréal / 514-377-4010 / www.foututissu.com
  • Interversion :  4273 Boulevard Saint-Laurent, Montréal / 514-284-2103 / www.interversion.com
  • Ludovik : 1318 Rue Notre-Dame Ouest, Montréal / 514-678-6617 / www.ludovik.ca (la marque Van Gogh Designs)
  • Luwiss Éco-rembourrage : 2205 Parthenais, atelier 101, Montréal / 514-502-7507 / luwiss.com
  • Montauk Sofa : 4404 Boulevard Saint-Laurent, Montréal / 514-845-8285 / www.montauksofa.com

Autres ressources : Pour ceux d'entre vous qui lisez l'anglais, Perkins + Will a publié un guide pour éviter les retardateurs de flamme dans l'environnement bâti : Healthy Environments: Strategies for Avoiding Flame Retardants in the Built Environment. Le guide propose un lien vers une liste de compagnies américaines qui offrent des meubles sans retardateurs de flamme (via le Center for Environment Health), ainsi qu'un lien vers leur propre liste de manufacturiers qui proposent des meubles sans retardateurs de flammes.