Il y a du biométhane issu de nos déchets ménagers dans les réseaux de Gaz Métro, sous forme de GNR ou gaz naturel renouvelable. Mais un tout petit peu… Est-ce que cette source est amenée à s’accroître, quitte à faire baisser la proportion de gaz de schiste ? Réponses dans cette entrevue que nous ont accordée les responsables du secteur Énergies nouvelles de Gaz Métro.

Une rencontre avec Geneviève Paquin, Donald Beverly et Yannick Rasmussen (Gaz Métro).

Écohabitation : - Y a-t-il déjà du biométhane dans les réseaux de Gaz Métro ?

Gaz Métro : - Oui! Mais le seul producteur actuel de biométhane au Québec est  le site d’enfouissement d’EBI Environnement  à Berthierville (Lanaudière). Ce biométhane est injecté dans un gazoduc géré par Gazoduc TQM.  Gaz Métro l’achète et le distribue via son réseau. À court terme, c’est-à-dire à l’horizon 2015, la quantité de biométhane pourrait atteindre 0.5 % du gaz qui circule dans le réseau, soit une production de 40 millions de mètres cubes par an. Nous établissons le potentiel théorique maximal à près de 15 à 20 % de la consommation de gaz naturel au Québec. Mais en tenant compte de diverses contraintes, ce potentiel chute à 5-10 %.

Rappel : c'est quoi, le biogaz et le biométhane ?

De quoi parle-t-on lorsque l’on parle de biogaz, de gaz vert ou de gaz naturel écologique? Le biogaz est produit naturellement par la biodégradation de matières organiques. La réaction concernée, la biométhanisation (ou « digestion anaérobie »), produit un biogaz qui peut être valorisé de plusieurs façons. Entre autres, il est possible de le purifier afin d’obtenir un biométhane de qualité comparable au gaz naturel qui circule dans nos réseaux. On peut alors injecter ce biométhane directement dans le réseau de gaz.

Écohabitation : - Pouvez-vous nous en dire plus sur les projets d’injection de biométhane dans le réseau ?

Gaz Métro : - À Saint-Hyacinthe (Montérégie), une usine produit déjà du biogaz issu principalement  de boues industrielles (déchets généralement pâteux issus de la chaîne de fabrication, boues d’épuration…) et accueillera plus tard les matières résiduelles résidentielles et industrielles. Pour l’heure ce biogaz n’est pas transformé en biométhane, et il sert à assécher les boues de l’usine municipale d’épuration. Ce biogaz fera l’objet d’une transformation en biométhane d’ici 2014 pour circuler dans nos réseaux. Les prévisions d’injection de biométhane sont de 13 millions de m3/an dans un horizon de 5 ans (le temps que la pleine production soit atteinte). Ce sera alors un des plus gros digesteurs anaérobiques en Amérique du Nord.

À Québec, une usine de biométhanisation  devrait être mise en route dans un ou deux ans également, et utilisera également des boues industrielles (en plus faible proportion) et davantage de matières résiduelles résidentielles (déchets ménagers). Les résidents devront déposer leurs déchets organiques dans un contenant spécifique; il faudra donc les sensibiliser pour as

Gaz Métro
© Gaz Métro

surer un approvisionnement régulier et de bonne qualité. Nous avons également d’autres projets à Montréal, Longueuil et Laval, mais ces projets sont encore assez vagues et lointains : il n’y a pas d’entente signée et la teneur des projets est en constante évolution.

Le biométhane ne va jamais dépasser le gaz naturel, mais il a beaucoup d’impacts positifs au niveau local. À Saint-Hyacinthe, en été, nous sommes capables d’alimenter avec du biométhane 50  % de la consommation en gaz des industries de l’agglomération!

Écohabitation : -  Selon vous, le biogaz a-t-il de l’avenir au Québec ?

Gaz Métro : - Le gouvernement du Québec a pour objectif de réduire de 20% ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020, et prend donc des initiatives pour y arriver. On peut consulter ces initiatives dans la Stratégie énergétique 2006-2015 du Québec et dans le Plan d’action 2006-2012 sur les changements climatiques. La valorisation de la matière organique est un enjeu particulièrement important car l’enfouissement des matières résiduelles génère actuellement près de 6 % des émissions de GES. Ainsi, le gouvernement a établi un plan d’action 2011-2015 pour sa Politique de Gestion des Matières Résiduelles dont la mesure 15 est la poursuite du Programme de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage, un soutien financier public au milieu municipal et au secteur privé pour l’installation d’infrastructures permettant de traiter la matière organique au moyen de ces deux procédés (valeur totale estimée à 650 millions de dollars). L’objectif est d’avoir la plus grande quantité de biométhane au Québec, mais ce développement est encore très lié à l’appui du gouvernement. C’est pour cela que ce type d’énergie n’en est encore qu’à ses débuts.

La production du biométhane coûte cher, ce qui le rend peu rentable par rapport au gaz naturel dont les coûts sont actuellement très bas. Ceci devrait rester le cas tant que l’avantage du biogaz au niveau de sa faible émissivité de GES ne sera pas pris en compte dans le prix de vente (on parle alors d’internalisation des coûts environnementaux). Ainsi, le nouveau marché de carbone du Québec, dont nous ferons partie en 2015, changera peut-être certaines choses, selon le coût des droits d’émissions qui sera fixé.

Le marché du carbone au Québec

Ce système encourage les entreprises à limiter leurs émissions de gaz à effet de serre en fixant des plafonds au-delà desquels elles doivent payer. Cet argent est alors redistribué aux entreprises qui, au contraire, en émettent moins.

Le Québec est un des membres pionniers de la Western Climate Initiative (WCI) qui vise à mettre en œuvre un marché du carbone nord-américain. Ainsi, le Québec est le deuxième membre après la Californie et le premier au Canada à adopter le « Règlement concernant le système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre »,  le 14 décembre 2011.

Écohabitation : - Êtes-vous en mesure de quantifier la part de gaz de schiste dans le réseau de gaz du Québec? Certains ont avancé le chiffre de 30%*. Serait-il possible de s’affranchir de ces importations par la production locale de biométhane?

Gaz Métro : - L’Alberta et les États-Unis ont effectivement fait le choix d’exploiter les gaz de schiste (ce qui n’est pas le cas au Québec, avec le moratoire sur l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste). Nous ne sommes pas en mesure de chiffrer la proportion de ces gaz naturels non conventionnels dans nos importations. Il faut également souligner que nous importons au Québec la quasi-totalité de nos besoins en gaz, avec près de 50% provenant de l’Alberta, et 50% d’une plateforme de distribution du gaz américain en Ontario. Notre approvisionnement va croître en provenance de ce point gazier ontarien, ce qui est un bénéfice environnemental car nous réduisons ainsi les besoins en transport de l’Alberta.

Ce que nous pouvons faire, c’est de produire plus de biométhane, et favoriser les économies d’énergie chez nos clients. Depuis 2000, notre Plan global en efficacité énergétique a permis une économie équivalente à  la consommation moyenne annuelle de 123 000 maisons, soit 510 000 tonnes de « CO2 équivalent ». Mais la production de biométhane restera relativement modeste. 

*Lucien Bouchard, ancien président de l’Association Pétrolière et Gazière du Québec (APGQ) avance un chiffre de 30% du gaz naturel distribué au Québec extraits à l’aide de la fracturation hydraulique.

 

Maintenant que vous savez pourquoi il faut interdire l'utilisation du gaz naturel problématique, trouvez plus d'information dans nos pages sur ci-dessous et dans notre guide de la construction écologique.

Trouvez des professionnels et des produits ainsi que des projets de maisons écologiques exemplaires dans notre répertoire de l'habitation durable.