Les résultats remarquables du projet-pilote de conversion énergétique aux Îles-de-la-Madeleine

Le projet Vers le Net-zéro madelinot est un projet pilote de conversion énergétique de deux maisons madeliniennes, effectué par Écohabitation en collaboration avec la Communauté maritime des Îles-de-la-Madeleine. Le projet tirait à sa fin à l’été 2025 et les résultats sont probants!

Les objectifs de la conversion énergétique aux Îles-de-la-Madeleine

Les maisons sur les Îles-de-la-Madeleine ont un impact de gaz à effet de serre 13 fois supérieur à la moyenne québécoise, dû à un contexte énergétique qui diffère du reste du Québec : la principale source d’énergie électrique des Madelinots provient d’une centrale thermique au mazout et près de la moitié des maisons remplissent leurs cuves de mazout, qu'ils consomment pour leurs besoins de chauffage et d'eau chaude sanitaire. De plus, l'impact des forts vents, très fréquents aux Îles-de-la-Madeleine, accentue les déperditions thermiques des maisons. 

Les objectifs principaux du projet étaient de diminuer la consommation résidentielle de mazout, réduire l’empreinte carbone du bâtiment et favoriser l’autonomie énergétique, tout en limitant l’impact sur le réseau électrique central. Pour y parvenir, le plan incluait l’implantation de mesures d’efficacité énergétique efficaces et de diversification des sources énergétiques des maisons, tout en veillant à ce que les solutions soient économiques et durables pour les propriétaires.

Le type de travaux effectués pour une meilleure efficacité énergétique

Deux maisons ont été sélectionnées à la suite d'un appel à candidatures. Une évaluation et une inspection ont été effectuées pour chacune d’elles, puis des équipements ont été installés en octobre 2024.

Plusieurs travaux ont été réalisés :

• des travaux d’isolation et d’étanchéité : après une infiltrométrie pour identifier les fuites d’air, des travaux d’isolation de l’entretoit ont été effectués, en plus de travaux pour réduire les infiltrations et les exfiltrations d'air (pare-air, passage de tuyaux, sorties de ventilation, etc.).

• système solaire autonome : 12 panneaux solaires ont été installés, soit des modules bifaciaux de 540 Wc, posés au sol ou sur une structure, pour une capacité totale de 6 480 W. Le rendement des panneaux bifaciaux est généralement 5 à 15 % supérieur par rapport à celui des panneaux standards.
• accumulateurs thermiques à changement de phase : dans le but de stocker une partie de l’énergie produite par les panneaux solaires, des accumulateurs de chaleur ont été installés dans les deux maisons. Ainsi, l'électricité produite par les panneaux solaires durant la journée est stockée sous forme de chaleur dans les accumulateurs. Ces derniers agissent de batterie thermique : la chaleur peut-être restituée plus tard, lorsque les propriétaires en ont besoin.

La solution plus simple d'électrification de la maison, c'est-à-dire le remplacement de la chaudière au mazout par une chaudière électrique, n'était pas pertinente aux Îles-de-la-Madeleine pour deux raisons :

• les objectifs de décarbonation ne seraient pas respectés puisque l'électricité du réseau vient de la combustion de mazout;
• la pression de consommation électrique sur la centrale est forte, ce qui compliquerait toute augmentation de la demande.

La chaudière au mazout a été conservée pour fournir la quantité d’énergie qui n’a pas pu être produite avec les panneaux solaires photovoltaïques.

Des résultats concrets pour la transition énergétique

Les données des deux maisons pilotes ont été suivies sur plusieurs mois pour évaluer la performance des solutions implantées. Et les résultats sont très positifs et encourageants!

Voici les résultats et les constats qui ont été évalués sur les 6 premiers mois de l’année, c’est-à-dire de janvier à juin.

Énergie produite et accumulateurs de chaleur

Environ 80 % de l'énergie solaire captée par les panneaux photovoltaïques a pu être stockée efficacement dans les accumulateurs thermiques à changement de phase. Ce taux n’atteint pas 100 % en raison des facteurs de perte et de l’autoconsommation des différents équipements du système. En tout, le système a permis de stocker un total de 2 500 kWh et de 3 000 kWh d'énergie renouvelable pour les deux maisons respectivement.

Les accumulateurs thermiques ont effectué de nombreux cycles de charge et décharge et ont prouvé leur efficacité à stocker une énergie thermique de manière très efficace. Les possibilités de ce type d'accumulation thermique démontrent pour le moment un potentiel presque inégalé parmi les technologies équivalentes, avec des avantages certains sur le stockage long terme et la minimisation des pertes de chaleur.

Cette énergie a été utilisée par les deux habitations pour contribuer au chauffage des locaux et au chauffage de l'eau domestique.

Réduction des GES des maisons

Les équipements installés ont permis d'économiser environ 300 litres de mazout dans la première maison et 350 litres dans l'autre, soit environ la moitié d'une cuve de mazout. Cela représente près de 750 kg de CO2 équivalents évités pour la première maison et 900 kg pour la seconde.

Pour se représenter l'impact sur la décarbonation, en moyenne, c'est l’impact d’environ 4 000 km parcouru en voiture à essence par maison. En termes financiers, cela représente une économie approximative de 200 $ sur la facture énergétique pour chacun des propriétaires.

Comme les données ont été calculées sur une demi-année, tous ces résultats pourraient donc être doublés pour représenter les économies à l’échelle d’une année complète.

Si l'on transpose ces 6 premiers mois à l'échelle des 2 000 maisons chauffées au mazout et possédant un système de chauffage hydronique aux Îles-de-la-Madeleine, l'implantation de cette solution aurait permis de diminuer la consommation de mazout du territoire de près de 650 000 litres, évitant ainsi l'émission de 1 650 tonnes de CO2 équivalents. C'est l'impact de 200 fois le tour de la Terre à l'équateur parcouru en voiture à essence.

Ces économies sont basées uniquement sur les équipements, mais il est possible d'augmenter les économies d'énergie en améliorant l'efficacité énergétique (travaux d’isolation et d’étanchéité) de l'enveloppe de la maison, ainsi qu’en réduisant ses besoins de chauffage. Il est important de prévoir ces solutions en amont de l’installation des équipements : ainsi, on peut diminuer la demande d'énergie annuelle des habitations et couvrir une portion encore plus importante de la demande en chauffage avec l'énergie renouvelable produite par les panneaux solaires.

La solution implantée et testée dans ce projet a donc très bien fonctionné et a permis de diminuer de façon importante la consommation de mazout dans chaque maison, ce qui était l'objectif principal du projet.

Ce potentiel de décarbonation a été rendu possible grâce à l'utilisation de la technologie innovante des accumulateurs thermiques à changement de phase. Cette technologie est un ajout particulièrement intéressant à la boîte à outils pour l'avenir énergétique des Îles-de-la-Madeleine et même plus largement, du Québec. Elle comporte plusieurs avantages :  

• flexibilité;
• possibilité de diversification des sources énergétiques par rapport à des chaudières existantes;
• combinaison avec des systèmes de production d'énergie renouvelable intermittente, solaire ou éolienne;
• accumulation de la chaleur directement utilisable dans le système de chauffage hydronique des habitations, évitant ainsi le changement complet du système de distribution de chaleur et favorisant l'autoconsommation;
• potentiel d'accumulation de la chaleur efficace en période de basse consommation avec une restitution en période de consommation plus importante, soutenant ainsi la gestion des épisodes de pointe sur le réseau électrique existant.

Pour un avenir énergétique durable aux Îles-de-la-Madeleine

Il est donc possible d'envisager une décarbonation des systèmes de chauffage aux Îles-de-la-Madeleine grâce à l'utilisation locale d'énergie renouvelable.

De plus, Hydro-Québec a annoncé vouloir encourager le déploiement de l'énergie solaire dans les résidences, en subventionnant notamment les panneaux solaires.

La solution que nous avons testée aux Îles-de-la-Madeleine confirme que cette conversion énergétique est tout à fait possible et aura des impacts positifs sur l’environnement. L'avenir énergétique de cette région du Québec est donc définitivement ouvert sur une diversité de solutions qui seront bénéfiques pour l'empreinte carbone du territoire.

Pour en savoir plus

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