Dans l'industrie du bâtiment comme partout, l'heure est à la réduction drastique de l'empreinte carbone. Le Conseil du bâtiment durable du Canada (CBDCa) l'a compris: en 2017 il lançait la Norme du Bâtiment à carbone zéro (BCZ), en 2020 il proposait au gouvernement fédéral d'adopter la BCZ pour toutes ses nouvelles constructions. La version 2 du programme, tout juste annoncée en mars, marque une étape supplémentaire vers la généralisation de son adoption. Les experts d'Écohabitation, convaincus que l'urgence carbone nous pousse à considérer l'énergie grise des bâtiments, sont conquis par cette approche. Voici leurs impressions.
Urgence carbone: enjeux du bilan carbone zéro pour les bâtiments
L'approche carbone zéro, qui évalue le bilan carbone d'un bâtiment dans son cycle de vie, incluant la construction, met l'emphase sur l’énergie grise consommée lors de la phase de construction. Jusqu'à maintenant, les certifications ne prenaient pas en compte les émissions de carbone liées à l'extraction de la matière, sa transformation, son transport, etc.
« L’exploitation des bâtiments est responsable de 17% des émissions de carbone du Canada et la construction et les matériaux sont responsables de 11 % additionnels, ce qui permet de réduire considérablement les émissions de carbone alors que l’industrie s’oriente vers l’élimination des émissions d’ici 2050. Cette transition nécessaire ouvre des voies nouvelles et innovantes vers le carbone zéro et accroît les possibilités de croissance de l’industrie et de création d’emplois. » Extrait de la Norme BZC v2 – Design
La certification Passive House et LEED® utilisent comme hypothèse la moyenne du réseau nord-américain ou européen de production énergétique. Ces moyennes comptent un pourcentage important de charbon et de gaz naturel, forts en émissions de GES. Le graphique ci-dessus illustre les taux d’émission selon les filières de production d’électricité. Ces hypothèses influencent grandement l’importance de l’énergie dans les certifications. Par contre, celles-ci sont peu réalistes si l’on regarde la situation du Québec, où 99% du la filière énergétique provient de l’hydroélectricité générant très peu de GES.
La nouvelle norme BCZ v2, une initiative du CBDCa, met le doigt sur une des faiblesses des certifications actuelles et leurs manières d’évaluer l’impact environnemental des bâtiments. Sans remplacer les autres normes et certifications, elle permet d’obtenir une image plus juste de la génération de GES provenant de la consommation énergétique.
« Les différentes sources d’émissions de carbone générées sont désormais prises en compte afin que les équipes de projet identifient et gèrent toutes les émissions du bâtiment, pas seulement la consommation énergétique. » Fin MacDonald, directeur du programme Bâtiment à Carbone Zéro du CBDCa
Au Québec, les principaux enjeux au niveau du bâtiment sont l’efficacité énergétique, éviter toute forme de combustion fossile et limiter l’énergie intrinsèque, c’est-à-dire l’intensité carbone des matériaux de construction.
Comment certifier un Bâtiment à Carbone Zéro
BCZ: une norme et une certification canadiennes
Il est maintenant possible au Canada d’obtenir une reconnaissance et de faire certifier un projet de bâtiment neuf ou existant qui atteint zéro émission de carbone sur son cycle de vie. Tous les grands projets de rénovation et de nouvelles constructions sont admissibles: immeubles de bureaux, établissements d’enseignement postsecondaire et d’entrepôts commerciaux. Côté résidentiel, seuls les bâtiments à logements multiples sont admissibles. Les habitations unifamiliales et les petits immeubles résidentiels multifamiliaux sont exclus du système.
Découvrez le service d’accompagnement personnalisé d’Écohabitaiton pour l’atteinte de la norme BCZ v2. Profitez de l’expertise de nos experts, Emmanuel, Guillaume et Denis et réalisez vos objectifs!
Les professionnels peuvent recourir au programme à deux étapes de leurs projets
Le programme offre deux voies possibles: design et performance.
En phase de conception, les nouveaux bâtiments et les bâtiments existants en rénovation majeure peuvent être certifiés BCZ pour le Design, en répondant aux exigences prescrites par cette voie.
La norme BCZ pour la Performance vérifie et atteste que les bâtiments atteignent effectivement un bilan carbone zéro dans leur fonctionnement année après année. Cette voie suppose de:
- démontrer l'atteinte du bilan carbone zéro ;
- compenser le carbone intrinsèque ;
- fournir la preuve d’achat de crédits carbone ;
- compenser toutes les fuites de réfrigérants ;
- mettre le plan à jour tous les 5 ans en cas de combustion sur place ;
- déclarer l'intensité énergétique et les pointes saisonnières ;
- effectuer des tests d'étanchéité si certifié BCZ-Design v2.
La vérification doit être effectuée tous les ans.
« Nous espérons développer le marché des matériaux de construction faibles en carbone et encourager une gestion efficace des fluides frigorigènes dans les systèmes de chauffage et de ventilation » Fin MacDonald
Service d'accompagnement pour l'obtention de la certification Bâtiment à Carbone Zéro
Écohabitation, la référence en habitation, compte parmi son équipe deux experts en efficacité énergétique et en analyse de cycle de vie, rompus à l'utilisation de logiciels puissants pour évaluer la performance des bâtiments, résidentiels comme commerciaux. Convaincus que le futur des bâtiments est au bilan carbone, Écohabitation a développé une pratique appronfondie en évaluation du bilan carbone. Aujourd'hui, l'organisme offre des services d'accompagnement aux promoteurs et architectes pour aider à l'obtention de la certification Bâtiment à Carbone Zéro du CBDCa.
Bâtiment à Carbone Zéro: l'avis des experts
Tous les critères de performance environnementale importants ont été pris en compte
Selon Emmanuel Cosgrove, directeur général chez Écohabitation, les concepteurs sont allés très loin dans le développement de la nouvelle norme BCZ v2 en tenant compte de deux enjeux majeurs, soit les détails des ponts thermiques et le monitoring de la consommation dans le temps et en période de pointe.
Emmanuel nous rappelle qu’afin de réduire les émissions de carbone d’un bâtiment, cinq points sont à retenir:
- Le carbone intrinsèque, entrant dans la fabrication des matériaux (par exemple le béton, l’aluminium, l’acier, etc).
- La consommation énergétique du bâtiment sans énergie fossile.
- Éliminer les ponts thermiques.
- Le monitoring de la consommation énergétique sur le long terme et pas uniquement basé sur une simulation énergétique.
- L’effacement de la consommation en pointe puisque le réseau québécois devient très polluant au cours de cette période.
« Le CBDCa a pensé à tout, on n'aurait pas fait mieux chez Écohabitation! » Emmanuel Cosgrove, directeur et porte-parole
BCZ: une approche exhaustive sur le cycle de vie du bâtiment, adaptée au Québec
Nous nous sommes tournés vers Guillaume Mignot, conseiller technique et expert ACV (analyse de cycle de vie) chez Écohabitation pour qu’il nous dise ce qu’il pensait de la nouvelle mouture de la norme BCZ. Il souligne que la division en deux volets, design et performance, permet de capter des sources différentes de carbone: le carbone intrinsèque contenu dans les matériaux de l’enveloppe et de la structure et le carbone opérationnel, issu de l’utilisation du bâtiment.
La réalisation d'un bilan carbone permet une réflexion en amont de la construction pour voir l’impact de nos choix, matériaux obligatoires et optionnels, sur les émissions de carbone. Pour chaque matériau, il faut détailler les mesures de réductions privilégiées et notamment réfléchir à des stratégies de séquestration. Toutes les émissions doivent être compensées par l’achat de crédits carbone en phase opérationnelle.
« Pour réaliser le bilan carbone des bâtiment, nous utilisons l'Impact Estimator de l'Athena Sustainable Materials Institute, la référence en Amérique du Nord. Sa base de données de matériaux, très complète, nous permet d'évaluer toutes les composantes du bâtiment » Guilllaume Mignot, CPI
Pendant la phase de performance, on tend vers l’élimination de toute combustion à l’intérieur du bâtiment (par exemple un appareil de chauffage au gaz). On demande une justification des choix, des stratégies de réduction et de produire un plan de transition vers le zéro carbone.
Guillaume mentionne que la grande différence apportée par la nouvelle version est qu’elle n’impose plus la production d’énergie renouvelable sur site, mais favorise les innovations relatives à chaque projet. Ceci était problématique au Québec puisque les méthodes de production d’énergie renouvelable génèrent plus de GES que l’hydroélectricité. (Voir le graphique ci-haut). Un gros non sens que la norme BZC v2 vient corriger.
Il faut mettre un minimum de deux stratégies en place en fonction des possibilités. Voici des exemples d’innovations:
- Production d’énergie renouvelable sur place pour assurer 5% des besoins du bâtiment.
- Installation de panneaux photovoltaïques sur 75% de la toiture.
- Puits géothermique pour 50% des besoins de chauffage.
- Système photovoltaïque intégré aux bâtiments.
- Carbone intrinsèque 20% moins élevé que la référence.
- Émission de carbone initial inférieur à 0.
Cette liste n’est pas exhaustive et d’autres stratégies spécifiques au projet peuvent être mises en place.
La prise en compte des fuites de réfrigérants favorise les systèmes de génération de chaleur et de froid centralisé
Finalement, nous avons sondé Denis Boyer, notre expert maison en efficacité énergétique. Conscient du fait qu'il ne suffit plus de construire en ne visant que la réduction de la consommation énergétique, il affirme qu'il est impératif de construire en tenant compte des émissions carbone.
Selon lui, la nouvelle norme BZC v2 va vraiment dans les détails, par exemple en tenant compte de l’impact des fluides réfrigérants. Ceux-ci ont un potentiel de réchauffement climatique de 3 000 à 4 000 fois plus fort que le CO2! Présents notamment dans les appareils de climatisation comme les thermopompes, les cas de fuites sont beaucoup plus fréquents que l’on pense. Et cet impact est décuplé lorsque l’on pense au nombre important de ces appareils dans nos habitations au Québec, au Canada et partout dans le monde.
Afin de contourner cette problématique, une solution à envisager pour les constructeurs ou entrepreneurs est de favoriser un système de génération de chaleur et de froid centralisé au lieu d’une multitude de petits appareils installés dans chaque unité. En effet, les fuites de réfrigérant sont plus difficiles à détecter et la maintenance moins fréquente que sur les systèmes plus gros. La contrepartie est une gestion plus complexe de la facturation à la consommation de chaud et de froid, mais cette gestion est possible.
Vers le développement d'une expertise internationale
Denis mentionne aussi qu’un autre côté bénéfique de cette norme est l’expertise acquise au fur et à mesure que des projets carbone zéro seront réalisés. Cette expertise pourra être exportée ailleurs dans le monde, ce qui en plus de représenter une opportunité d’affaire, est d’une grande importance pour la planète et la lutte aux changements climatiques. Encore faut-il que les autres pays embarquent dans le mouvement.
« La norme Carbone Zéro est conçue pour être déployée à grande échelle. En proposant un cadre flexible pour atteindre le zéro émission, nous voulons que la norme soit applicable à tous les bâtiments, pas seulement au top 10%. »Fin MacDonald
Concevoir selon la Norme Carbone Zéro au Québec
Nos experts Emmanuel, Guillaume et Denis peuvent accompagner les promoteurs à concervoir des bâtiments qui répondent au standard Bâtiment à Carbone Zéro. Découvrez le service d’accompagnement personnalisé d’Écohabitation et réalisez vos objectifs de durabilité.
« Si à partir d’aujourd’hui on construisait seulement des habitations zéro carbone, l’impact serait le même que si on arrêtait de construire et d’habiter nos bâtiments! » Denis Boyer, B. Sc., M. Ing., ing.
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