Il existe divers procédés de filtration ou de traitements pour éliminer les particules solides ou les pathogènes qui peuvent coloniser les réservoirs d’eaux grises. Les systèmes de traitement disponibles sur le marché intègrent les processus suivants :

  • Les filtres physiques, par exemple de sable, qui retiennent les particules qui pourraient servir de source organique biodégradable par les colonies microbiennes ;
  • Les agents chimiques, normalement le chlore, qui détruisent les micro-organismes pathogènes ;
  • Les processus de désinfection, tels que les rayons UV ou l’ozonation, sont généralement utilisés en dernier lieu d’un système haut de gamme pour éliminer les bactéries et produire une eau de qualité ;
  • Les processus biologiques, qui sont basés sur les mécanismes naturels de digestion par les bactéries.

On peut rajouter à cette liste un processus de décantation (pré-filtrage) qui consiste à laisser l’eau grise reposer pendant une période de temps assez longue pour que les particules solides se déposent au fond. Il faut garder à l’esprit que l’eau grise peut notamment contenir beaucoup de matière fibreuse issue des vêtements (dans le cas où le drain de la machine à laver est connecté au système de collecte) qui peut rapidement bloquer les filtres, de gras issu de l’évier de cuisine qui peut boucher les tuyaux, et de poils et cheveux qui peuvent s’enchevêtrer dans le système de pompage. La première ligne de défense contre ces problèmes est la filtration de base, préférablement à l’aide de filtres nettoyables et facilement accessibles.

S’il y a une règle d’or à observer lors de la conception d’un système de récupération des eaux grises, c’est… qu’il n’y a pas de règle universelle s’appliquant à tous les bâtiments et à tous les besoins. Mais une mauvaise conception pourrait mener à un impact net négatif.[1] Si par exemple la quantité d’eau réutilisée et économisée annuellement est faible, un système complexe comprenant pompes, valves, tuyauterie, filtres et contenants de stockage aurait une empreinte environnementale globalement négative sur le cycle de vie du système. Il vaudrait donc mieux alors de laisser les eaux grises se perdre directement dans les égouts, à moins bien sûr que la sécheresse estivale puisse donner une valeur additionnelle à votre système.

Si votre système intègre une pompe pour faire fonctionner votre gestion des eaux grises, sachez que la pompe se bloque facilement, notamment parce que l’eau grise est pleine de petits déchets (cheveux, fibres de vêtements) qui bloquent le système de filtration... Par ailleurs, une pompe peut tirer une quantité considérable d’électricité : vous aurez donc substitué le gaspillage de l’électricité au gaspillage de l’eau. À moins de traiter de gros volume d’eaux grises, auquel cas la pompe et le système sophistiqué de filtration qui l’accompagne sont des instruments essentiels, il est préférable de viser un système qui ne nécessite pas de pompe.

La réglementation

Il est essentiel pour les autorités d’établir un cadre de gestion relatif au traitement décentralisé des eaux grises. Les systèmes de traitements décentralisés comme on en retrouverait dans les maisons individuelles doivent avant tout être conçus de manière à protéger à la fois la santé publique et les ressources en eau.

Réutilisation

Que disent actuellement les règlements sur l’implantation des systèmes de traitement domestique des eaux grises ? Ai-je le droit d’avoir un système d’eau grise chez moi ? Jusqu’à récemment, ce n’était pas permis, alors qu’aujourd’hui, il est possible de récolter ses eaux grises pour la chasse d’eau.  Les exigences relatives à la plomberie des réseaux d’eau non potable sont définies par la norme CSA B128.1-F06/B128.2-F06 (Conception et installation des réseau d’eau non potable/Entretien et mise à l’essai à pied d’œuvre des réseaux d’eau non potable), et le Code national de plomberie (eau non-potable).

Évacuation

Dans les zones urbaines, pour les habitations reliées au réseau d’égouts municipaux, il n’y a pas d'enjeu spécifique à l’évacuation des eaux grises dans les égouts. Le problème se pose pour les habitations isolées dont les occupants recyclent une part importante de leur eau. Toutes les habitations isolées, non reliées au réseau d’égouts, sont obligées d’installer un champ d’épuration dont l’étendue est fondée sur le nombre de… chambres, et pas d’habitants permanents. Ce dont n’auront pas besoin les maisons dotées de toilette sèche et d'un système d'eaux grises ! Mais c’est obligatoire….

Les résidences non branchées ont souvent des systèmes d’épuration surdimensionnés.

Dans un monde idéal, avec une toilette sèche et un système de récupération d’eaux grises (donc très peu d’eau souillée), on aurait seulement besoin d’un tout petit champ d’épuration pour les eaux grises.

Les subventions

Existent-ils des subventions pour des systèmes de récupération d’eaux grises au Québec ?  Non, à moins que vous habitiez dans une ville où les autorités ont une vision avant-gardiste comme Victoriaville. Dans une municipalité où les compteurs d’eau dans le secteur résidentiel sont déjà en vogue, les économies réalisables en vertu de l’installation d’un système de recyclage des eaux grises représentent un incitatif intéressant en soi. Par ailleurs, certaines villes subventionnent indirectement la récupération d’eau grise à travers les subventions au programme LEED, lequel accorde un point pour l’installation d’un système d’eau grise.

L’avenir de la réglementation

On estime qu’un système de compteur d’eau permettrait une comptabilisation plus juste de l’utilisation de la ressource hydrique.  Et il serait souhaitable que la réglementation permette, dans un avenir rapproché, une dérogation pour les habitations isolées munies de toilette sèche. Des règlements plus spécifiques aux eaux grises devraient cependant apparaître au cours des prochaines années. 

[1] Oasis design. Common Grey Water Errors and Preferred Practices: An ongoing effort to counter the tidal wave of grey water misinformation on the web.