Hydrogène, carburant et énergie verte?

On entend de plus en plus parler de l'Hydrogène (H) comme d'un enjeu majeur en matière de lutte contre la pollution. Pourquoi ? Parce que la molécule d’hydrogène est considérée comme non polluante, mais aussi particulièrement énergétique :

  • La combustion de 1kg d’hydrogène libère 3x plus d’énergie que 1kg d’essence
  • L'hydrogène est produit à partir de ressources renouvelables
  • Les rejets sont composés uniquement d’eau
  • L'hydrogène permet plus d’autonomie et le stockage (impossible avec l’électricité)

Par contre, il occupe plus de volume que tout autre gaz et, surtout, on le retrouve rarement à l’état naturel. 

  • Il faut environ 7 litres d’hydrogène comprimé pour fournir autant d’énergie que 1 litre d’essence.
  • Il faut le transporter dans des bouteilles ou des pipelines sous forme comprimée ou liquide, ce qui est très dispendieux. 

Bref, bien que l’hydrogène semble représenter une source d’énergie intéressante pour le futur, les défis technologiques, les coûts élevés, les infrastructures et autres problématiques favorisent le développement d'autres sources d'énergie verte, comme l’énergie solaire et éolienne. 

Mais pourrions-nous réduire notre dépendance aux énergie fossiles en utilisant une autre filière renouvelable, l’hydrogène, dans les années à venir ? Pas à court terme, non...

L'hydrogène, c'est quoi ?
L'hydrogène est transporté par pipelines ou sous forme comprimée, dans des bouteilles.

L’ hydrogène, définition. C'est quoi ?

L’élément le plus abondant de l’univers est l’hydrogène (75 % de la masse de l’univers et 10 % de l’être humain). L’eau, par exemple, est composée d’oxygène et d’hydrogène (H2O) - deux molécules d’hydrogène pour une d’oxygène. Mais on retrouve aussi l’hydrogène dans de nombreux éléments, comme ceux comprenant du carbone, par exemple : le méthane (CH4), les gaz réfrigérants (HCFC), etc. 

Pour obtenir de l’hydrogène, on doit le séparer avec une source énergétique. Ainsi, selon la source utilisée, l' hydrogène peut être plus ou moins vert !

L’hydrogène n’est pas une source d’énergie à proprement parler. Comme l’électricité, c’est plutôt un vecteur énergétique. Ce qui signifie qu’il sert à transporter l’énergie produite : l’énergie produite grâce aux turbines actionnées par le mouvement de l’eau dans les barrages parvient dans nos maisons via le réseau électrique, par exemple. Dans le cas de l’hydrogène, il doit être comprimé ou liquéfié pour servir de vecteur, puisque c’est un gaz très peu dense, ce qui demande des quantités importantes d’énergie. Et comme il n’est pas vraiment présent à l’état pur dans la nature (toujours couplé avec une autre molécule), il faut aussi de l’énergie pour l’en séparer. 

L’énergie utilisée peut venir de différentes sources, biomasse, décomposition thermochimique, vaporeformage (réaction du méthane avec de l'eau), gazéification… mais 95 % de l'hydrogène est actuellement produit par des sources fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel), puisque c’est la solution la moins coûteuse. Ce qui signifie que de produire de l’hydrogène, non polluant, implique l'utilisation des sources émettrices de GES. 

Décomposer les molécules d'eau avec l'hydroélectricité

On peut utiliser de l’hydroélectricité pour décomposer des molécules d’eau (H2O) et utiliser l'hydrogène : l'énergie obtenue serait ainsi propre. Et au Québec, on a aussi des surplus énergétiques en abondance (la plupart du temps), qu’on ne peut malheureusement pas stocker. En utilisant l’excédent des centrales hydroélectriques, l’hydrogène produit pourrait être stocké et reconverti en électricité au besoin, pendant la période de pointe par exemple.

Mais, bien qu'il soit possible de produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau (ce qui pourrait être fait au Québec), l'hydrogène représente de nombreux défis, au niveau du transport et au niveau technique, qui n'en fait pas une filière intéressante pour le moment, pas même dans notre province. 

Trop de défis pour que l'hydrogène soit une filière énergétique intéressante 

De fait, un déploiement à grande échelle n'est probablement pas pour avant des dizaines d'années, le coût de l’électrolyse étant encore de 2 à 3 fois supérieure à celui du reformage par hydrocarbures. Le déploiement de cette filière nécessite donc d’importants investissements, tant pour la production que pour la distribution et le stockage. Il est peu probable que, sans un support des pouvoirs publiques et d’importants engagements du secteur industriel, l’hydrogène puisse se développer comme filière énergétique d'ici là.

En fait, des analyses cycle de vie, comprenant la production d'hydrogène, la conversion de l'hydrogène en chaleur ou en électricité, et enfin l'utilisation de cette chaleur ou de cette électricité à des fins utiles démontrent qu'aucune filière hydrogène actuellement disponible (qu'elle utilise des combustibles fossiles, des combustibles nucléaires ou des technologies renouvelables comme source d'énergie primaire pour produire de l'électricité ou de la chaleur), n'est aussi efficace que l'utilisation directe de l'électricité ou de la chaleur provenant de l'une de ces sources. En outre, il est démontré que les véhicules électriques utilisant des batteries pour stocker l'électricité sont plus efficaces et moins polluants que les véhicules à pile à combustible utilisant l'énergie stockée dans l'hydrogène...

*Présentement, Air Liquide, à Bécancour, produit la majorité de l'hydrogène de la province. 

L’ hydrogène dans les transports

Trains, bateaux, voitures, scooters, vélos électriques, bus... de nombreux pays développent cette filière en l'utilisant dans les transports. C’est d’ailleurs le carburant de la fusée Ariane depuis plusieurs décennies, et la première voiture à l’hydrogène est née en 1966 !

La recharge d'une voiture à hydrogène

Train et avion. Le train à hydrogène Coradia iLint construit par Alstom transporte des voyageurs en Allemagne depuis 2018. De son côté Boeing a fait voler un avion propulsé à l’hydrogène en 2008. Cela a inspiré plusieurs projets dont Ampere en 2016, un avion alimenté par dix piles à hydrogène. 

Des voitures chez Honda, Toyota et Hyundai. Les modèles Daimler, Mirai, ix35 et Nexo s’ajoutent aux 600 taxis Hype de la compagnie STEP pour fournir des options de plus en plus intéressantes de véhicules à l’hydrogène. On les recharge très rapidement (presque aussi vite qu’une voiture à essence) via des stations d’air liquide, elles offrents une belle autonomie (généralement plus de 450 km) et elles n’émettent pas de GES en opération (et non, ça n’explose pas). Ceci dit, faire le plein à l'hydrogène est dispendieux. Par exemple, recharger sa voiture à électricité en Californie coûte 4 $, versus 50 $ en hydrogène. 

Hydrogène et carburant
Recharger sa voiture qui carbure à l'hydrogène : rapide, sans émissions, mais coûteux !

Tramway et bateau. La Chine a mis en service en 2017 à Tangshan le premier tram à hydrogène. Dans la même année, un bateau à hydrogène nommé Energy Observer a été mis à l’eau à Saint-Malo afin d’entamer son tour du monde. Il produit sa propre énergie à bord ! Il sera donc complètement indépendant en énergie pour les 6 ans prévus de son périple. 

*Les piles à combustible hydrogène ressemblent aux batteries classiques (avec anode, cathode, électrolyte), mais au lieu d’être stockée, l’énergie est plutôt produite avec du carburant (de l’hydrogène).

Consommation d’hydrogène dans le monde

Notons que l’hydrogène reste marginal : moins de 2 % de la consommation mondiale d’énergie. Ceci dit, selon une étude réalisée par le Hydrogen Council, il serait possible que ce taux grimpe à 20 % d’ici 2050. Une bonne nouvelle si on veut limiter le réchauffement à 2 °C, en plus de créer de l’emploi. 

SOURCES